Tout comme le mélomane aime flâner chez son disquaire à la recherche de découvertes musicales pour ravir ses oreilles, une des choses les plus agréables pour tout amateur de bière est de flâner chez son caviste et de découvrir de nouvelles bières qui raviront ses papilles. Chaque nouvelle bière est synonyme de nouveaux arômes, de nouvelles saveurs et de plaisir gustatif à venir! Cependant, la lecture d’une étiquette de bière n’est pas toujours facile pour le néophyte qui peut donc se retrouver face à une mauvaise surprise au moment de décapsuler sa bouteille. Pour éviter ce genre de déconvenues, notre caviste bien-aimé sera toujours de bon conseil mais une bonne lecture de l’étiquette pourra déjà orienter nos achats.
La législation définissant les mentions obligatoires sur les étiquettes de bière est relativement floue; les inscriptions peuvent donc être très variables d’une brasserie à l’autre. Voici un aperçu de tout ce que vous pourrez trouver sur une étiquette de bière.

- Nom de la bière : Le nom d’une bière peut être très simple ou très fantaisiste; avec ou sans rapport direct avec la bière en question. Il ne faut donc pas trop se fier au nom. Souvent les bières d’abbaye sont appelées « Double », « Triple » ou « Quadruple »; cette appellation fait référence au style de la bière (abordé plus bas).
- Nom de la brasserie : Bien qu’il ne faut pas trop se référer au nom de la brasserie pour savoir ce qui se cache précisément dans une bouteille, celui-ci peut être un gage de qualité. Si vous connaissez et appréciez le style de l’une ou l’autre brasserie (mes brasseries préférées), ça peut toujours servir de référence. Le nom de la brasserie peut parfois aussi faire référence à un terroir ou à des valeurs chères au brasseur.

- Ingrédients : Souvent, la liste des ingrédients est très exhaustive et ne reflète que vaguement le profil aromatique de la bière. Une chose bonne à savoir (valable aussi pour les autres produits que la bière) est que les ingrédients sont listés par ordre décroissant d’importance dans la composition de produit final. Vous retrouverez donc en ingrédient principal l’eau et le malt (ou malt d’orge). Quand la liste indique malt, il s’agit toujours de malt d’orge. Les autres céréales peuvent également être maltées mais elles sont en général mentionnées. Rares sont les brasseries qui détaillent la composition précise en malts de leur recette mais quelques-unes le font. Parmi les autres céréales possibles, on peut retrouver du blé (souvent dans les bières de type « blanches ») qui confère plus de légèreté et un peu d’acidité à la bière; du riz ou du maïs, souvent l’apanage des bières industrielles pour procurer du sucre à moindre coût, qui donne un goût « cheap » et parfois un peu rance (maïs) à la bière. On retrouvera souvent aussi du houblon et des épices dans la liste. En général ces ingrédients ne sont pas plus détaillés mais de plus en plus, les brasseries artisanales fournissent une liste des houblons utilisés (pour plus de détails sur les houblons, c’est ici). Et bien évidement, de la levure! Sans elle nous n’aurions pas de bière possible. Je ne pense pas qu’un seul brasseur ne détaille sa souche de levure utilisée car il s’agit de l’âme de sa bière!
- Pourcentage d’alcool : Il s’agit du pourcentage du volume de liquide occupé par l’alcool (éthylique). Une bière de 33cl à 5% d’alcool contient 1,65cl d’alcool pur. En général les bières titrent entre 3,5% et 12% d’alcool cependant il n’y a pas de limite inférieure ni supérieure au titre d’alcool d’une bière. Par comparaison, un vin sera toujours aux alentours de 12-13% d’alcool. Par conséquent, une bière de 33cl à 12% d’alcool équivaut à 2.5 verres de vin. Attention ça peut taper fort!

- Caractéristiques spécifiques de la bière :
- IBU : l’IBU (International Bitterness Unit) est la mesure de l’amertume relative d’une bière. Plus l’IBU d’une bière sera élevé, plus elle sera amère. Attention, cette mesure ne tient pas compte de l’amertume perçue. En effet, plus une bière est ronde et corpulente, moins elle sera perçue comme amère. L’IBU d’une bière peut varier de 1 à 120; en général à 40-50 IBU, une bière sera déjà perçue comme très amère. Bien sur cela reste relatif à la sensibilité du goûteur.
- EBC / SRM : l’EBC (European Brewery Convention) ou SRM (Standard Reference Method) chez les Anglophones détermine la couleur de la bière. Plus l’EBC / SRM sera élevé, plus la bière sera foncée. A titre de référence, les Pils et Pale Ale auront un EBC de 4 à 12 (SRM 2-6); les « Ambrées » se situeront entre 20-35 EBC (10-18 SRM); les « Brunes » entre 35-50 EBC (18-25 SRM); les Noires, « Porter » et les « Stouts » seront au-delà de 50 EBC (25 SRM)
- Extrait : Souvent exprimé en degré Plato (°P), il représente le pourcentage en masse d’extrait sec du moût avant fermentation. Un degré Plato représente donc 1g de matière sèche soluble (sucre) dans 100g de moût. Cette mesure est liée à la densité et sert à mesurer le degré d’alcool après fermentation.
- Style : Il existe de nombreux styles de bières! En voici quelques exemples :
- Double: le nom correspond à deux fois la quantité d’ingrédients de base utilisés lors du brassage. Il s’agit d’une bière brune assez sucrée dont la balance tire sur le malt titrant à 6-7% d’alcool.
- Triple: le nom correspond à trois fois la quantité d’ingrédients de base utilisés lors du brassage. Il s’agit d’une bière blonde, ronde et épicée dont la balance tire sur le malt titrant à 8-10% d’alcool.
- Quadruple: le nom correspond à quatre fois la quantité d’ingrédients de base utilisés lors du brassage. Il s’agit d’une bière brune assez sucrée dont la balance tire sur le malt titrant à 10-12% d’alcool.
- IPA: le nom (India Pale Ale) fait référence à la colonisation des Indes par l’empire Britannique. Il s’agit d’une bière blonde (Pale Ale) dont la balance tire sur le houblon. Assez amères et fruitées, ces bières font la part belle au houblon sous toutes ses formes (amérisant, aromatique, dry-hopping, …). Il en existe des variantes américaines : APA = American Pale Ale (moins amère en générale); NEIPA = New England India Pale Ale (très aromatique aux accents de fruits exotiques). En version double on parlera de DIPA.
- Stout: Il s’agit d’une bière noire des îles britanniques aux accents torréfiés (café, chocolat) avec beaucoup de corps. Elle existe aussi en version Imperial ou Russian qui sont plus fortes en alcool.
- Porter: Il s’agit d’une cousine de la Stout, plus sèche et facile à boire.
- Gueuze: Il s’agit d’une bière traditionnelle de la région Bruxelloise, fermentée avec des levures sauvage et vieillie en fut de chêne entre 6 mois et 3 ans. Souvent acides, ces bières sont très fraîches et boisées.
- Pils: Le nom fait référence à la ville de Pilzen ou furent brassées les premières bières Pils. Souvent il s’agit d’une mauvaise appellation de la Lager internationale; bière de fermentation basse dont le principal atout est son côté rafraîchissant. Les vraies Pils traditionnelles présentent plus d’intérêt avec un malt Pilsen assez fin et un houblon Saaz, herbacé et citroné.
- Blanche: Le nom de cette bière est du à une mauvaise traduction de l’Allemand. La Weiss Beer Allemande est une bière de blé. En néerlandais elle à été traduite en Witbier; bière Blanche en Français. Il s’agit d’une bière blanche légère et trouble aux accents de citron et de coriandre. En Belgique elle doit sa tradition à la région de Hoegaarden.

- Lieu de Brassage: En général, la bière est brassée à la brasserie (indication « brassée par…). Cependant, attention, parfois la bière est brassée chez un sous-traitant (indication « brassée pour… »). On appelle ça des bières « à façon » dont l’appellation « artisanale » pose question. On peut parfois trouver une autre appellation (brassée par… à…). On appelle ces brasseurs des « gipsy-brewers ». Ils n’ont pas/plus d’installations propres et louent les installations d’un collègue brasseur pour brasser eux-mêmes leur bière. L’appellation « artisanale » est ici toujours valable car le brasseur à encore les mains sur son produit.
- Logos: On retrouve plusieurs logos ou appellations sur les étiquettes de bières qui peuvent parfois indiquer un réel gage d’authenticité. D’autres fois, il ne s’agit que d’une indication commerciale destinée à « tromper » le consommateur. Parmi les logos, on peut retrouver:
- ATP (Authentique Trappist Beer) : Il s’agit d’une appellation contrôlée qui répond à 3 critères essentiels : La bière doit être brassée dans une abbaye trappiste de confession cistercienne, sous la supervision de moines trappistes et ne doit pas servir à faire du profit.
- Belgian Family Brewers: Il s’agit d’une appellation contrôlée qui indique que la bière est brassée dans une brasserie « familiale » dont la taille n’est pas spécifiée mais qui doit toujours être en possession de la famille du fondateur depuis plusieurs générations.
- Bière d’abbaye: Il s’agit d’une appellation non contrôlée et souvent utilisée à des fins commerciales. Elle fait plus souvent référence à un style de bière qu’à un réel rapport avec une abbaye quelconque. La seule contrainte est de reverser une petite participation à l’abbaye en question (quand elle existe) pour avoir l’autorisation d’utiliser le nom.
- BBD ou DLUO (Best Before Date ou Date Limite d’Utilisation Optimale) : Il s’agit d’une date indicative après laquelle le brasseur ne peut plus garantir les qualités gustatives de son produit. En théorie, une bière ne périme pas. Cependant, elle peut perdre en arôme (les houblons aromatiques s’estompent rapidement en général), en pétillant, virer au vinaigre…
